Eric Sadin : L'ère de l'individu
tyran (aux Editions Grasset)
et sur son
site
L’ouvrage d’Éric Sadin était dans les bacs bien avant
l’assassinat de Samuel Paty, Vendredi 16 Octobre. Pour ne pas
parler de l’attaque sanglante, jeudi, à Nice. Difficile
néanmoins, de ne pas faire le lien, au vu des profils, pourtant
très différents, des auteurs des deux attentats. Observateur
critique des nouvelles technologies, le philosophe n’a de cesse
de dénoncer les dangers d’un développement dérégulé du
numérique, et son influence démesurée sur nos usages. Avec
«L’Ère de l’individu tyran», il fait un pas de côté, pour
plonger plus profond aux racines du mal. Dans cet essai
sous-titré «la fin d’un monde commun», il entend démontrer
comment les réseaux sociaux ont certes contribué à accélérer la
déstructuration de nos sociétés, mais que le mouvement était
bien engagé, par des décennies d’application aveugle des
doctrines néolibérales. «Nous avons été dépossédés de nous-mêmes
depuis ce tournant, nous confiait Éric Sadin, quelques jours
après la décapitation de Samuel Paty. Un grand nombre d’entre
nous a expérimenté un sentiment de délégitimité de soi,
d’invisibilité sociale, se voyant contraint d’assister au
creusement des inégalités, à la disparition des services
publics... Se sont produites des désillusions successives à
l’égard de la société, de la classe politique, une rupture du
pacte de confiance.» Un constat commun à de nombreuses strates
de la population, exacerbé par cette caisse de résonance,
formidable mais incontrôlable, qu’est Internet. «Depuis une
vingtaine d’années, les technologies numériques, dont l’usage
est de plus en plus assidu, offrent à tout un chacun le
sentiment d’un surcroît de puissance, le sentiment d’être plus
autonomes, de pouvoir mieux maîtriser sa vie. Et via les réseaux
sociaux, ces “plate formes de l’expressivité”, de pouvoir
ressentir la jouissance de l’importance de soi, de pouvoir
continuellement faire valoir ses opinions, via des interfaces
qui appellent à la brièveté des formules, concourant à générer
des formules toujours plus catégoriques, expéditives. Tout cela
contribue à une brutalisation des échanges. Et une forme de
surdité entre les différentes composantes du corps social.»
Sentiment de toute puissance, Éric Sadin analyse par ce prisme
le mouvement des gilets jaunes, la poussée des populismes, mais
aussi le «djihadisme individuel», cette folie meurtrière, qui
saisit des laissés pour compte de la société, autoradicalisés
devant leur écran. «Les violences djihadistes, au-delà des
seules convictions religieuses, procèdent des mêmes ressorts de
l’expérience de l’humiliation pour des groupes souvent
défavorisés. L’appel au meurtre tend à inverser ce sentiment
d’inutilité et d’humiliation. Cela met en jeu un sentiment de
toute-puissance – mettre autrui sous sa loi, jusqu’au crime – et
une héroïsation de la personne par une logique de martyr.» Le
philosophe constate l’échec de l’idéologie dominante, pourtant
arc bouté sur le Tina, «There is no alternative», malgré les
enseignements de la crise du Covid-19. Et pointe «l’ingouvernabilité
permanente» de sociétés atomisées, et la volatilité des
comportements dans ce qui constitue pour lui un «tournant
implosif». Un train lancé à toute vitesse vers un mur pas si
lointain, sans que l’on sache exactement où sont les freins...
(Sud-Ouest)
Cynthia Fleury (sur
Wilkipédia)
La philosophie politique et la psychanalyse ont en partage un
problème essentiel à la vie des hommes et des sociétés, ce
mécontentement sourd qui gangrène leur existence. Certes,
l’objet de l’analyse reste la quête des origines, la
compréhension de l’être intime, de ses manquements, de ses
troubles et de ses désirs. Seulement il existe ce moment où
savoir ne suffit pas à guérir, à calmer, à apaiser. Pour cela,
il faut dépasser la peine, la colère, le deuil, le renoncement
et, de façon plus exemplaire le ressentiment, cette amertume qui
peut avoir notre peau alors même que nous pourrions découvrir
son goût subtil et libérateur. L’aventure démocratique propose
elle aussi la confrontation avec la rumination victimaire. La
question du bon gouvernement peut s’effacer devant celle-ci :
que faire, à quelque niveau que ce soit, institutionnel ou non,
pour que cette entité démocratique sache endiguer la pulsion
ressentimiste, la seule à pouvoir menacer sa durabilité ? Nous
voilà, individus et État de droit, devant un même défi :
diagnostiquer le ressentiment, sa force sombre, et résister à la
tentation d’en faire le moteur des histoires individuelles et
collectives. Présentation de l'éditeur
Cynthia Fleury,
philosophe et psychanalyste, professeur titulaire de la Chaire
Humanités et Santé au Conservatoire National des Arts et Métiers
est titulaire de la Chaire de Philosophie à l’Hôpital du GHU
Paris Psychiatrie et Neurosciences. Elle poursuit, avec Ci-gît
l'amer. Guérir du ressentiment, son travail autour de
l’individuation et de l’État de droit, entamé avec Les
Pathologies de la Démocratie (Fayard, 2005), La Fin du courage :
la reconquête d’une vertu démocratique (Fayard, 2010), Les
Irremplaçables (Gallimard, 2015 puis 2018) et Le soin est un
humanisme (Gallimard, 2019).
David Dufresne
(son
site web) Écrivain, réalisateur, punk
rock, sous surveillance et contre-filatures, David Dufresne vient de
réaliser « Un pays qui se tient sage », son premier long métrage au
cinéma, soutenu par la Quinzaine des réalisateurs de Cannes 2020. Auparavant, il a publié « Dernière
sommation » (Grasset, 2019), son premier roman, après une dizaine
d’ouvrages d’enquête dont « On ne vit qu’une heure, une virée avec
Jacques Brel » (Le Seuil, 2018) et « Tarnac, magasin général » (Calmann
Lévy, Prix des Assises du Journalisme 2012), salué comme « un petit
chef d’œuvre » par Le Monde. En 2019, il a a reçu le Grand Prix du
Journalisme 2019 aux Assises internationales du Journalisme pour son
projet Allo Place Beauvau sur les violences policières, travail
reconnu par l’ONU, le Conseil de l’Europe et le Parlement européen. Il a remporté le World Press Photo 2011 catégorie œuvre non
linéaire pour son webdocumentaire
Prison Valley (avec Philippe
Brault), qui lui a ouvert les portes du MIT Open Documentary lab,
où il fut artiste en résidence deux années.
Pierre Bordagedit travailler davantage sur ses personnages et leur histoire
personnelle, qui font « le sel des romans », que sur le choix d'une
époque particulière ou la description des technologies qui
l'accompagnent. Ses œuvres, particulièrement Les Guerriers du
silence et Wang, montrent des personnages amenés à
découvrir leur part spirituelle de manière solitaire, puis une force
intérieure qui les rend capables d'affronter toutes les épreuves et
de mettre en échec les stratégies adverses. Selon Le Dauphiné
libéré, « chaque personnage de Bordage
est le lieu où se livre un combat entre les pulsions les plus
sombres et l'aspiration à la lumière ». Si bon nombre de ces
personnages sont violents et immoraux, si plusieurs scènes décrivent
des viols, des meurtres ou des prises de pouvoir fascistes, Pierre
Bordage met en cause les structures sociales et les
conditionnements, mais pas la nature humaine. De plus, il se déclare
féministe à l'occasion, rappelant que la femme est à l'origine du
« mystère de la vie ».
De manière générale et selon Science-Fiction magazine,
Pierre Bordage est un auteur humaniste qui met l'accent sur l'amour
du prochain et la notion de la tolérance dans l'ensemble de son
œuvre. S'il se révèle assez pessimiste quant à l'avenir d'une
humanité très destructrice dans ses propres écrits, il s'estime
lui-même optimiste, et affirme que l'un des plus grands dangers
serait la disparition de l'être humain, car il croit que la pensée a
une influence sur la matière, vue comme une illusion selon la
spiritualité orientale. Une idée que l'on retrouve dans bon nombre
de ses œuvres comme Les Guerriers du silence et les
Griots
célestes. Dans ses œuvres, le salut de l'humanité passe par la
spiritualité non religieuse, par le rejet du matérialisme qui
conduit à vouloir toujours plus de biens et de territoire puis
dégrade les rapports avec autrui (ce qui explique que Pierre Bordage
tente de faire réfléchir sur l'« être »), par la lutte contre les
conditionnements et les jugements d'autrui qui en découlent.
(Wilkipédia)
Dominique Bourg, né le
à Tavaux (Jura), est un philosophe
franco-suisse, professeur
honoraire à l'université de Lausanne. Il se présente aux élections
européennes de 2019 en France à la tête de la liste Urgence
écologie, qui obtient 1,82 % des suffrages.Le marché
contre l'humanité, Paris, Puf, 2019, 167 p.
Du fondement de la désobéissance civile Par Dominique Bourg Au fondement de la désobéissance civile
se trouve la conviction d’un écart insupportable entre ce qu’une
morale minimale exige d’un côté, et de l’autre ce qu’autorise un
état du droit ou quelque décision particulière des autorités
publiques. Cette définition correspond parfaitement à l’occupation
par XR le 17 février dernier des locaux de quelques sociétés de
trading matières ou hydrocarbures à Genève ou Lausanne. D’un côté,
un état du droit qui permet(la
suite sur le site "La pensée écologique").
Marie de Hennezel: "Cette prise
de conscience brutale que nous sommes mortels change notre rapport à
la mort". Psychologue clinicienne, auteure notamment de Et si
vieillir libérait la tendresse, In Press (2019).
Jean Rouaud :Sans l’intention d’un emploi
régulier, exerce des activités diverses dont découpeurs de dépêches
pour la presse nantaise et écriture de billets d’humeur à la une de L’Éclair.
En août 1981 quitte Nantes pour Paris. (la
suite sur son site)